29/06/2023

Bagarre de rue : prise de décision sous stress

Bagarre de rue : prise de décision sous stress

Quel liens pourrait il exister entre les effets du stress sur la prise de décision et une bagarre de rue ? S’entraîner durement et régulièrement au combat est salvateur et pourrait peut-être un jour servir lors d’une situation conflictuelle.

 

Mais croire que le principe de répétition est la solution ultime, se rapproche plus de la foi qu’autre chose.

 

Lorsqu’il s’agit également d’affirmer que l’apprentissage d’une multitude de réponses comportementales (les fameuses « techniques de self-défense ») dans un milieu aseptisé n’est pas si utile pour savoir se défendre lors d’une bagarre de rue, il faut le prouver.

 

« La charge de la preuve est l'obligation faite à une personne ou à l'une des parties en présence d'apporter, par des arguments étayés et vérifiables, la preuve qu'une proposition avancée est vraie ou bien fausse, selon le cas. » (1)

 

Dans ce genre de circonstances, de nombreuses décisions doivent être prises sous tension, et de nombreuses situations de décision suscitent des réactions de stress.

 

Ainsi, le stress et la prise de décision sont intimement liés, non seulement au niveau comportemental, mais aussi au niveau neuronal, c'est-à-dire que les régions du cerveau qui sous-tendent la prise de décision intacte sont des régions sensibles aux changements induits par le stress. 

 

Les décisions jouent un rôle de premier plan dans de nombreux domaines de la recherche psychologique. Les processus de décision couvrent un large éventail de décisions complexes, telles que la prise d'inférences (4), la sélection d'une alternative avec le plus grand bénéfice ou la prise de décisions sociales ou morales.

Impact du stress sur la prise de décision

Sur le plan conceptuel, les décisions peuvent être différenciées par leur degré relatif d'incertitude, car certaines situations de décision offrent plus d'informations sur le résultat attendu que d'autres (Weber et Johnson, 2009) (2)

 

L’objectif but de cette revue (2) était de résumer les résultats des études qui ont analysé l'impact du stress sur la prise de décision. L'examen comprend des études qui ont examiné la prise de décision sous stress chez l'homme et ont été publiées entre 1985 et octobre 2011.

 

Les études examinées ont été trouvées à l'aide des recherches PubMed et PsycInfo. L'examen se concentre sur les études qui ont examiné l'influence du stress de laboratoire induit de manière aiguë sur la prise de décision et qui ont mesuré à la fois la performance de la prise de décision et les réponses au stress.

 

Lors d’une bagarre de rue, ce qui va déterminer la suite et fin des événements (chercher la désescalade, se défendre ou fuir) ne dépendra uniquement que de prises de décisions et absolument pas de « techniques de self-défense ». Ces comportements ne sont que la résultante d’une prise de décision.

 

À titre d’exemple : en infériorité numérique face à un certain nombre de belligérants, la sagesse voudrait que la fuite soit la prise de décision la plus sage. Au vu des observations éthologiques effectué, il s’avère que ce n’est pas toujours le cas et qu’une multitude de paramètres non-mesurables entre en compte pour pouvoir statuer définitivement.

Les décisions à risque impliquent des composants stratégiques

Dans les situations de prises de décision de la vie courante, les conséquences potentielles positives ou négatives sont souvent précisées et les probabilités associées sont connues ou elles sont principalement calculables.

 

Sur la base de corrélations rapportées dans des études de patients, il a été récemment présenté que les décisions à risque impliquent des composants stratégiques, c'est-à-dire le calcul du risque, ainsi que des processus émotionnels, c'est-à-dire le traitement des souvenirs des décisions précédentes.

 

Cependant, l'impact potentiel des stratégies de calcul sur la prise de décision en situation de risque n'a pas été systématiquement étudié jusqu'à présent. Dans la présente étude (5), Matthias Brand a examiné 42 personnes saines (à part égal d’hommes et de femmes) exposées à la tâche du jeu de dés (7), mesurant les décisions à risque, ainsi qu’un questionnaire évaluant l'application de la stratégie dans des éléments comparables aux choix de la tâche.

 

Les sujets ont effectué la tâche de jeu de l'Iowa (6), examinant la prise de décision sous ambiguïté, et une batterie de tests neuropsychologiques axés sur les fonctions exécutives.

 

Les résultats indiquent que décider avantageusement dans une tâche de prise de décision avec des règles explicites et stables est lié à l'application de stratégies de calcul.

 

 

En revanche, les individus qui décident intuitivement préfèrent les choix risqués ou désavantageux dans la tâche du jeu de dés. Les résultats appuient l'idée que les processus et stratégies de calcul peuvent améliorer la prise de décision dans des conditions de risque explicites.

 

Les conditions environnementales de la rue lors d’une bagarre, sous l’effet du stress, ne permettent pas des prises de décisions calculables fiables.

Bagarre de rue : tous égaux dans la prise décision

L’éthologie étudie le comportement animal dans son milieu naturel ainsi qu’en milieu expérimental. La prise de décision lors d’une bagarre de rue se confronte à trois paramètres :

  • la vitesse (de réaction, des événements…) ;
  • le chaos (la psychologie, la douleur physique…) ;
  • l’aléatoire (contexte, type d’adversaire…).

Il n’est donc possible d’étudier l’effet du stress dans une prise de décision lors d’une bagarre de rue qu’en milieu expérimentale. L’objet de ces recherches (3) était de comprendre si et comment, le stress psychosocial aigu affecte la prise de décision risquée dans la vie réelle, et a des conséquences profondes quand chaque être humain à l'occasion de prendre une décision importante, dans des circonstances provoquant l'anxiété.

 

Anna J. Dreyer à montré que, sur une mesure de laboratoire normalisée, la prise de décision des risques (la tâche de jeu de l'Iowa), les hommes et les femmes caractérisés comme des répondeurs à faible cortisol (ainsi que ceux du groupe non stressé) ont pris des décisions beaucoup plus risquées que celles caractérisées comme des répondeurs à cortisol élevé.

 

De même, sur une nouvelle tâche valable dans la vie réelle (un forum de discussion en ligne qui présentait un contexte social sexuellement suggestif), les hommes et les femmes caractérisés comme des répondeurs à faible cortisol (mais pas ceux caractérisés comme des répondeurs à cortisol élevé) étaient, par rapport à ceux du groupe non stressés, beaucoup plus susceptibles de prendre des décisions risquées.

 

Ensemble, ces résultats suggèrent une réponse posologique entre les élévations du cortisol induites par le facteur de stress et la prise de décision risquée.

Aucune différence de sexe dans une prise décision à risque

Cette relation pourrait être observée chez les hommes et les femmes dans différentes situations de tâche.

 

Bien que les résultats soient généralement cohérents avec les tendances de la littérature, la nouveauté de l’étude est la démonstration que la prise de décision risquée dans des conditions stressantes est mieux prédite par l'ampleur de l'élévation du cortisol par le participant que par son sexe ou par le type de prise de décision de la tâche. (3)

La bagarre de rue n’est pas un sport de combat

En outre, certaines études portant sur la prise de décision dans des conditions de stress naturel et sur les capacités de prise de décision chez des patients souffrant de troubles liés au stress sont décrites. Les résultats des études incluses dans l'examen appuient l'hypothèse selon laquelle le stress affecte la prise de décision.

 

Si le stress confère un avantage ou un inconvénient en termes de résultat, cela dépend de la tâche ou de la situation spécifique. Les résultats soulignent également le rôle des variables médiatrices et modératrices.

 

Conclusion

 

Les résultats des études qui ont été incluses dans cette article (2, 3, 3) soutiennent l'hypothèse selon laquelle le stress affecte la prise de décision. Si le stress confère un avantage ou un désavantage en termes de résultat, cela dépend de la tâche ou de la situation spécifique.

 

Des études qui ont étudié les performances de prise de décision sous un stress aigu en laboratoire, chez des participants sains ont indiqué que le stress peut modifier les mécanismes sous-jacents de la prise de décision, tels que :

  • l'utilisation de « la stratégie » ;
  • l'ajustement  « de la réponse automatisée » ;
  • le traitement de « rétroaction ».
  • etc.

Face au stress la répétition n'est pas la solution magique

Il est de ce fait possible d’affirmer sans détour que le stress altérera ou aura une incidence notoire dans une bagarre de rue, lors de la restitution des comportements et des scénario répété jusqu’à plus soif dans des dojos ou des salles de sport stérile.

 

 

Même si tout apprentissage est basé sur la répétition, le contexte d’apprentissage et sa généralisation, la méthode d’apprentissage (association et essais/erreur) sont tout aussi important.


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Sources :

 

(1) https://www.toupie.org/Dictionnaire/Charge_preuve.htm

(2) Decision making under stress: A selective review

https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0149763412000218

(3) Risky Decision Making Under Stressful Conditions: Men and Women With Smaller Cortisol Elevations Make Riskier Social and Economic Decisions https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC8854750/

(4) https://www.cnrtl.fr/definition/inf%C3%A9rence

(5) The role of strategies in deciding advantageously in ambiguous and risky situations

https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/18231817/

(6) Tâche de jeu de l'Iowa Tâche de jeu de l'Iowa

https://fr.abcdef.wiki/wiki/Iowa_gambling_task

(7) Tâche de jeu de l'Iowa Tâche de jeu de l'Iowa. « Basé sur la tâche de jeu de l'Iowa (Bechara et al., 1994) et la tâche de risque (Rogers et al., 1999), la tâche de jeu de dés (Brand et al., 2005) a été développé pour évaluer l'influence possible des fonctions exécutives sur la prise de décision dans une situation de jeu. »

https://psycnet.apa.org/doiLanding?doi=10.1037%2Ft31313-000