07/11/2025
La question du nombre de morts par arme blanche en France suscite des interrogations compte tenu de la médiatisation des agressions au couteau.
Selon une note incompréhensiblement confidentielle de la Direction Nationale de la Police Judiciaire (DNPJ) de mars 2024, 29 % des homicides en France sont
commis avec une arme blanche.
> Ce qui représenterait approximativement 280 à 290 décès annuels pour la période récente.
Cette proportion est supérieure à la moyenne mondiale établie par l'Office des Nations Unies contre la Drogue et le Crime, qui situe l'utilisation dans les homicides à environ 22
%.
Toutefois, cette estimation repose sur des données insuffisantes et un déficit flagrant de statistiques publiques en France.
> Comprendre ces chiffres nécessite d'examiner attentivement :
Les données officielles françaises ne distinguent pas systématiquement les types d'armes utilisées dans la criminalité, créant un vide statistique majeur.
Le Service Statistique Ministériel de la Sécurité Intérieure (SSMSI), organisme officiel étrangement rattaché au ministère de l'Intérieur, ne le fait pas non plus dans ses
publications annuelles.
Les statistiques regroupent sous des catégories larges comme « vols avec armes » des réalités hétérogènes incluant simultanément les armes à feu et les armes blanches (couteaux, poignards,
machettes, marteaux, battes de baseball, tournevis).
Contrairement à d’autres pays qui publient des statistiques détaillées sur les modes opératoires de cette criminalité, la France souffre d'un étrange déficit en matière de compilation statistique.
L'Observatoire National de la Délinquance et des Réponses Pénales (ONDRP), qui produisait des études détaillées sur les modes opératoires criminels, a été supprimé en 2020.
> Cette dissolution a créé un vide considérable pour le suivi des homicides :
La dernière étude détaillée de l'ONDRP portant sur ces violences remonte à la période 2015-2017, rendant obsolète toute comparaison avec la situation
actuelle.
Cette absence de continuité statistique complique l'identification des tendances et l'évaluation de l'ampleur réelle du phénomène des décès par couteau en France.
Les données disponibles proviennent de sources disparates :
Cette segmentation empêche toute vision cohérente du nombre annuel de morts par arme blanche sur l'ensemble du territoire français.
La source la plus précise récente provient d'une note confidentielle de la Direction Nationale de la Police Judiciaire datée de mars 2024, révélée par les médias français.
Cette analyse porte sur les violences commis entre 2019 et 2021 et établit que 29 % des homicides en France sont commis avec une arme blanche,
ce qui en fait le mode opératoire le plus fréquent, devant les armes à feu et autres procédés
En appliquant cette proportion de 29 % aux données officielles totaux enregistrés par le SSMSI, on obtient des estimations du nombre de morts par arme blanche en France pour
chaque année.
> Le SSMSI fournit les chiffres totaux suivants :
> L'application du taux conduit aux estimations suivantes :
La moyenne pour la période 2019-2024 s'établit ainsi à environ 265 décès par an. Ces chiffres constituent des estimations basées sur l'application d'un taux moyen.
Cette proportion de 29 % place la France au-dessus de la moyenne mondiale. L'Office des Nations Unies contre la Drogue et le Crime (ONUDC) établit l'utilisation à environ
22 % de l'échelle globale.
> Les couteaux et objets tranchants ont été utilisés dans 97 183 crimes dans le monde en 2021, représentant cette moyenne du total mondial.
La France se situe ainsi dans la fourchette haute par rapport à la moyenne planétaire, tout en restant dans la moyenne européenne qui oscille entre 30 et 40
%.
> Cette proportion varie considérablement selon les régions :
> La note de la DNPJ de mars 2024 fournit des informations détaillées sur le profil type des auteurs :
> La précarité sociale caractérise également ce profil :
> La dimension territoriale est également marquée :
Concernant les victimes, l'âge moyen est de 38 ans, avec près d'un quart (24 %) ayant moins de 26 ans.
La prédominance masculine est également marquée chez les victimes, reflétant la surreprésentation masculine dans ces violences létales.
> Les circonstances de commission des violences révèlent des contextes spécifiques :
> Les rivalités entre groupes constituent un autre contexte majeur :
> Dans 90 % des cas, l'agresseur était connu de la victime, confirmant que ces actes s'inscrivent majoritairement dans des relations préexistantes (familiales, amicales, voisinage).
Selon les données disponibles, les couteaux de cuisine représentent la majorité des armes blanches utilisées.
Cette prédominance s'explique par leur disponibilité immédiate dans tout foyer, ne nécessitant aucune acquisition préalable.
> Un élément souligné par la DNPJ concerne le taux d'élucidation particulièrement élevé de ce type de crimes :
Cette différence s'explique par la proximité physique nécessaire entre l'auteur et la victime lors de l'utilisation, qui génère davantage de traces matérielles (ADN, fibres, traces biologiques) qui facilite l'identification de l'auteur.
Une étude de l'ONDRP a analysé 602 homicides commis à Paris et en petite couronne entre 2007 et 2013 constitue l'une des rares analyses
françaises détaillant le nombre de morts et les modes opératoires sur une période longue.
> Les résultats révèlent que 64 % ont été commis au moyen d'une arme dans cette zone géographique.
Parmi ces infractions avec arme, 34 % ont été perpétrés avec (couteaux et autres instruments tranchants), contre 23 % avec une arme à feu.
> Elle constituait le mode opératoire armé le plus fréquent dans la région parisienne pour la période étudiée, devançant nettement les armes à feu :
Cette différence pourrait s'expliquer par des spécificités urbaines ou par une évolution temporelle entre les deux périodes d'étude.
60 % des attaques mortelles commises avec une arme blanche ou par coups ont lieu dans la sphère privée, et près de la moitié sont perpétrés au domicile de la victime.
> Inversement, les homicides par arme à feu présentent un profil différent :
Entre 1994 et 2013, l'étude de l'ONDRP a constaté une baisse de 65 % du nombre de délits dans la région parisienne, passant de 256 en 1994 à 94
en 2013.
Cette diminution spectaculaire témoigne d'une amélioration générale de la sécurité dans la capitale et sa proche banlieue.
Sur l'ensemble de cette période (1993-2013), 3 137 personnes ont été victimes d'un homicide volontaire selon l'Institut Médico-Légal de Paris.
Sur ces victimes, plus de 31 % ont été tuées par ce type d'objet, confirmant la prédominance de ce mode opératoire en région parisienne.

L'analyse de l'évolution récente des meurtres totaux en France permet de contextualiser l'évolution probable des décès par arme blanche.
Après une période de stabilité relative entre 2016 et 2020, le nombre de meurtre a connu une hausse continue de 2021 à 2023, passant de 881 à 1010
victimes.
Cette augmentation de près de 15 % en trois ans a suscité des inquiétudes légitimes.
En 2024 le nombre a baissé de 2 %, avec 976 à 980 victimes enregistrées selon les sources.
Cette diminution constitue un signal positif, bien que le niveau reste supérieur de 28 % par rapport à 2016.
Les données partielles du premier semestre 2024 indiquaient 942 victimes, soit une baisse de 8 % sur les douze derniers mois.
Toutefois, cette tendance positive s'est accompagnée d'une hausse préoccupante de 11 % des tentatives d'homicide, avec 4 305 tentatives enregistrées en 2024,
contre 3 584 en 2023.
Cette augmentation des tentatives suggère que la violence létale potentielle reste élevée, même si le nombre de décès diminue.
Bien que les données statistiques manquent pour confirmer une augmentation objective du nombre spécifique de morts, plusieurs indicateurs indirects suggèrent une préoccupation relative.
> L'augmentation du nombre d'armes blanches saisies constitue l'un de ces indicateurs :
> Le port par les jeunes constitue également un phénomène préoccupant :
En 2024, la Police Nationale a communiqué le chiffre de 10 397 attaques au couteau enregistrées (hors gendarmerie et préfecture de police de Paris), soit une moyenne de
28,5 incidents quotidiens.
Ce chiffre est faux.
> Il est indispensable de souligner qu'il ne représente pas le nombre de morts, mais le nombre total d'agressions enregistrées par la Police Nationale sur son périmètre de compétence,
qui ne couvre pas l'intégralité du territoire :
En l'état actuel des connaissances et sur la base des données officielles disponibles, le nombre de morts par arme blanche en France s'établit à environ 265 à
290 décès par an pour la période 2019-2024, sur la base de l'application du taux de 29 % établi par la DNPJ aux totaux enregistrés.
> Ces estimations comportent des limites importantes
La France nécessite urgemment la mise en place d'un système de collecte statistique systématique et transparent sur les types d'armes utilisés dans les assassinats.
Pourquoi il y a des crimes à l’arme blanche au Royaume-Uni ? Pauvreté, école, géographie et modèles temporels chez les adolescents...
Sources :
- https://journals.sagepub.com/doi/pdf/10.1177/10439862241249632
- https://journals.sagepub.com/doi/pdf/10.1177/002234332311851693
- https://www.tandfonline.com/doi/pdf/10.1080/17440572.2023.2211513?needAccess=true&role=button
- https://pmc.ncbi.nlm.nih.gov/articles/PMC11876296/
- https://journals.openedition.org/cybergeo/26112
- https://journals.sagepub.com/doi/pdf/10.1177/00223433221108428
- https://www.ihemi.fr/sites/default/files/publications/files/2019-12/ga_35_0.pdf
- https://www.datapandas.org/ranking/stabbing-deaths-by-country
- https://worldpopulationreview.com/country-rankings/stabbing-deaths-by-country
- https://www.ihemi.fr/sites/default/files/inline-files/GA_35_characteristics_homicides_paris.pdf
- https://www.ifrap.org/data/les-chiffres-cles-de-la-securite-en-france
- https://mobile.interieur.gouv.fr/Interstats/Actualites/Insecurite-et-delinquance-en-2024-bilan-statistique-et-atlas-departemental
- https://www.bnsp.insee.fr/ark:/12148/bc6p09qht8r/f1.pdf
- https://www.insee.fr/fr/statistiques/5763563?sommaire=5763633
- https://assets.cureus.com/uploads/original_article/pdf/253692/20240524-29207-5qfwth.pdf
- https://gh.bmj.com/content/bmjgh/9/4/e014912.full.pdf
- https://pmc.ncbi.nlm.nih.gov/articles/PMC1730718/
- https://journals.sagepub.com/doi/10.1177/14773708221103799