19/08/2025

La France fait face à un enjeu de santé publique majeur avec les accidents de la vie courante, troisième cause de mortalité après les cancers et les maladies cardiovasculaires.

Ces événements non intentionnels causent chaque année 20 000 décès et 4,5 millions de passages aux urgences.

Dans ce cadre, les blessures par couteau constituent une part significative des traumatismes, bien que rarement étudiée de manière isolée.

Les données disponibles proviennent de plusieurs sources : l’Institut de Veille Sanitaire (Santé Publique France), l’Assurance Maladie, l’INRS (Institut National de Recherche et de Sécurité) et la MSA (Mutualité Sociale Agricole).

Leur croisement permet d’établir une estimation consolidée : entre 210 000 et 250 000 personnes sont blessées annuellement par des couteaux en France.

Ce chiffre global inclut les accidents domestiques, professionnels et les violences. Nous sommes bien loin des titres alarmistes de la presse.

Les blessures par couteau se répartissent en trois grandes catégories : 

• Les accidents domestiques (environ 80 % du total), principalement en cuisine

• Les accidents du travail, concentrés dans les secteurs de l’alimentation

• Les traumatismes pénétrants graves, souvent liés à des agressions ou aux tentatives de suicide 

Cette répartition met en lumière une réalité méconnue : 

• La majorité des plaies par arme blanche ne sont pas criminelles, mais accidentelles.

La transparence sur ces données est essentielle pour orienter efficacement les politiques de prévention.

La cuisine est l’environnement domestique le plus exposé aux accidents liés aux objets tranchants. 

Elle concentre 24 % de tous les accidents domestiques, soit environ 2,64 millions d’incidents par an. 

Parmi les accidents domestiques, les coupures représentent 37,8 % des incidents survenant lors de la préparation des repas.

Environ 200 000 personnes consultent chaque année pour des blessures liées à l’utilisation de couteaux en cuisine.

Ces plaies, souvent localisées aux doigts et aux mains, peuvent nécessiter des sutures, voire une intervention spécialisé en chirurgie de la main. 

Plusieurs facteurs augmentent le risque d’accident : 

• La mauvaise manipulation des couteaux

• L’environnement dangereux : plan de travail glissant, éclairage insuffisant, précipitation

• Le manque de formation : peu de personnes reçoivent une formation aux gestes sécuritaires en cuisine

Les enfants de 1 à 4 ans sont particulièrement vulnérables, représentant une part importante des victimes :

• 60 % des accidents domestiques chez les enfants conduisent à une consultation aux urgences, soulignant la gravité potentielle de ces incidents.

Les professionnels de l’alimentation sont les plus exposés aux blessures par couteau.

Les données de l’Assurance Maladie et des risques professionnels pour 2023 révèlent des taux d’accidents bien supérieurs à la moyenne nationale.

Avec 64,7 accidents pour 1 000 salariés, la boucherie-charcuterie affiche le taux d’accidents du travail le plus élevé en France.

Ce chiffre est plus du double de la moyenne nationale. Les couteaux de découpe, scies à os et hachoirs sont impliqués dans 24,9 % des accidents, principalement des plaies.
 
Les conditions de travail aggravent les risques : 

• Le travail au froid, réduisant la dextérité

• Les cadences excessives et les postures contraignantes

• Le manque de formation, surtout pour les intérimaires

Environ 1 530 coupures sont recensées chaque année dans ce secteur, selon les estimations croisées de la MSA et de l’INRS. 

Le secteur de la restauration enregistre 33,8 accidents pour 1 000 salariés. 

Les coupures représentent environ 20 % des accidents, soit 3 853 blessures par couteau annuelles. 

Les cuisiniers manipulent rapidement des ustensiles tranchants, souvent en situation de stress ou de fatigue due aux horaires décalés.
 
L’industrie agroalimentaire, employant près de 500 000 personnes, affiche un taux de 40 accidents pour 1 000 salariés.

Bien que les chutes soient la première cause d’accident, les coupures restent fréquentes dans les chaînes de découpe.

Environ 2 850 cas de blessures par couteau sont estimés chaque année dans ce secteur. 

La France présente des spécificités épidémiologiques marquées en matière de blessures par arme blanche, notamment par rapport aux États-Unis.

Une étude nationale a recensé environ 2 200 cas annuels de plaies par armes à feu ou armes blanches, dont la majorité (environ 1 540) sont des plaies par arme blanche.

Le ratio arme blanche/arme à feu est de 3/2 à 6/1, contre un ratio inverse aux États-Unis, où les armes à feu dominent.

Cette différence s’explique par la législation stricte sur les armes à feu en France. Les circonstances des traumatismes pénétrants sont réparties ainsi : 

• 50 % : agressions

• 33 % : tentatives de suicide 

• 8 % : accidents

• 9 % : causes indéterminées

La mortalité des traumatismes pénétrants est de 15 % en phase préhospitalière, mais chute à 8 % à l’hôpital.

Les plaies par arme blanche sont moins létales que celles par arme à feu (2 % contre 16 % en milieu hospitalier), car elles causent généralement une seule lésion.
 
La France dispose d’un réseau spécialisé (60 centres SOS Main) et de protocoles standardisés, ce qui limite la morbidité.

Cependant, ces cas représentent moins de 1 % des prises en charge des SMUR, soulignant leur rareté relative. 

Certaines populations sont plus exposées aux blessures par couteau, en raison de facteurs démographiques, professionnels ou socio-économiques. 

• Les enfants de moins de 15 ans : ils représentent 48 % des victimes d’accidents de la vie courante. Les plus jeunes (1-4 ans) sont particulièrement vulnérables en cuisine

• Les hommes jeunes : dominent dans les traumatismes pénétrants graves, avec un âge moyen de 34 ans

• Les personnes âgées : bien que moins sujettes aux coupures, elles représentent 60 % des décès par accidents domestiques, souvent liés à des complications

Les travailleurs précaires (intérimaires, saisonniers) sont plus exposés, notamment dans la restauration. 

Le manque de formation, la pression des cadences et la sous-déclaration des accidents aggravent les risques.

Dans les milieux professionnels, les facteurs clés sont : 

• La maintenance défaillante des outils coupants

• L’organisation du travail : cadences élevées, postures répétitives et pénibilité du travail en horaires décalés 

Combien de personnes sont blessées par des couteaux en France par an ? La réponse, fondée sur des données officielles et des études épidémiologiques, pointe vers une estimation de 210 000 à 250 000 cas annuels.

Ce chiffre, bien que considérable, reflète surtout une réalité d’accidents domestiques et professionnels, représentant environ 80 % du total dont on ne parle jamais.

Les agressions, souvent mises en avant dans le débat public, ne constituent qu’une minorité des cas.

Cette transparence sur les statistiques est essentielle pour orienter les politiques de prévention vers les bonnes directions : formation aux gestes sécuritaires, équipements de protection en milieu professionnel, et sensibilisation des publics vulnérables.

Comprendre la réalité des blessures par couteau, c’est reconnaître que le danger se trouve souvent là où on l’attend le moins : dans notre cuisine, sur notre lieu de travail, et non dans la rue. 

Sources :

- https://pmc.ncbi.nlm.nih.gov/articles/PMC1349555/
- https://pmc.ncbi.nlm.nih.gov/articles/PMC7938523/
- https://pmc.ncbi.nlm.nih.gov/articles/PMC2774692/
- https://www.vie-publique.fr/en-bref/294972-insecurite-et-delinquance-les-chiffres-definitifs-pour-2023
- https://www.santepubliquefrance.fr/maladies-et-traumatismes/traumatismes
- https://www.semanticscholar.org/paper/Les-accidents-du-travail-dans-des-entreprises-de-la-Chau-Patris/7500f6df769e038b596958ff213df8405a7b0b02
- https://pmc.ncbi.nlm.nih.gov/articles/PMC10835411/
- https://www.inrs.fr/demarche/atmp/statistiques-nationales.html
- https://sofia.medicalistes.fr/spip/IMG/pdf/Specificite_de_la_prise_en_charge_des_traumatismes_penetrants.pdf