21/12/2024

Quelles sont les causes de l'agressivité et de la rage humaine ?

Quelles sont les causes de l'agressivité et de la rage humaine ?

Bien que les causes soient multiples et qu'aucune solution simple ne soit probable, ce problème peut être quelque peu atténué en comprenant les causes profondes, qui incluent les substrats et mécanismes neurologiques sous-jacents à l'expression du comportement violent.

L'agressivité et de la rage humaine résultent de causes multiples, incluant des facteurs culturels, environnementaux, sociaux et neurologiques.

Bien que son expression varie selon le contexte, des substrats neuronaux spécifiques semblent sous-tendre différentes formes d'agression, parallèles à celles observées chez les animaux.

Des preuves montrent que l'agression est souvent liée à des troubles cérébraux, tels que les troubles affectifs, la schizophrénie, les traumatismes crâniens, les tumeurs cérébrales ou la maladie d'Alzheimer (1).

Le « dyscontrôle épisodique » (2) illustre particulièrement cette relation, avec des comportements agressifs déclenchés sans provocation claire, attribués à des anomalies cérébrales spécifiques.

 

Ce phénomène, observé chez les enfants et les adultes, suggère une base neuronale commune pour l'agression tout au long du développement cérébral.

La classification de l’agression : une typologie controversée

Les chercheurs s’accordent sur le fait que l’agression n’est pas un phénomène unitaire et qu’elle revêt plusieurs formes. Cependant, des désaccords persistent quant à la manière de les catégoriser.

Les modèles binaires et les modèles multi-types :

  • Certains chercheurs prônent une réduction à deux types principaux d’agression. L'agression affective et l'agression prédatrice.
  • D'autres soutiennent une approche multi-typologique incluant des sous-catégories plus nuancées.
  • Enfin, certains soulignent que les types idéaux peuvent être trompeurs, car les formes d’agression réelles sont souvent mixtes et complexes.

Agression typologie classique de Moyer (1968) (3) :

  • Induite par la peur : attaque déclenchée lorsqu'un animal, incapable de fuir, fait face à une menace.
  • Maternelle : protection de la progéniture face à une menace perçue.
  • Entre mâles : compétition pour les ressources ou la dominance.
  • Par irritation : réponse à un stimulus irritant ou menaçant.
  • Liée au sexe : associée à l'acte sexuel et parfois observée chez les animaux comme chez les humains.
  • Prédation : dirigée vers une proie, distincte des autres types, souvent dénuée d'émotion.
  • Territoriale : défense d’un espace contre un intrus, souvent observée dans le modèle « résident-intrus ».

Ces catégories montrent que l’agression animale et humaine présente des similarités profondes, bien que l’agression humaine soit souvent plus complexe, mêlant émotion, planification et stratégies instrumentales.

Les deux formes principales d'agression

Malgré la diversité des classifications, deux formes dominent :

Agression affective (réactive ou impulsive) :

  • Associée à des émotions intenses comme la peur ou la colère.
  • Déclenchée par une menace immédiate perçue.
  • Caractérisée par une réponse rapide, souvent désorganisée et non préméditée.
  • Impliquant des structures cérébrales comme l'hypothalamus médial et la substance grise périaqueducale (4).

Agression prédatrice (proactive, préméditée ou instrumentale) :

  • Planifiée et souvent dénuée d’émotion apparente.
  • Dirigée vers un objectif précis (ex. : chasse ou manipulation intentionnelle d’autrui).
  • Impliquant des régions cérébrales différentes, notamment le cortex préfrontal pour la planification et le contrôle exécutif.

Ces deux formes peuvent coexister et interagir, rendant l’étude de l’agression particulièrement complexe.

Relation entre la rage défensive, l'attaque prédatrice et l'agression humaine

Les comportements de rage défensive et d’attaque prédatrice chez les animaux présentent des parallèles significatifs avec certaines formes d’agression humaine. Toutefois, la rage défensive a été davantage étudiée, car elle est plus fréquente et plus facilement identifiable chez les humains que l'agression prédatrice.

Caractéristiques communes de la rage défensive chez les animaux et les humains :

  • Activation sympathique marquée : réponse physiologique intense impliquant une augmentation soudaine de l’activité du système nerveux sympathique.
  • Impulsivité et absence de planification : la réponse est rapide, non préméditée et indépendante du contrôle cortical, comme le montre son maintien malgré l’ablation du cerveau antérieur.
  • Déplacement de la cible : l’agression peut se détourner vers d’autres individus présents dans l’environnement.
  • Nature aversive : la rage défensive vise à éliminer ou à réduire le stimulus menaçant, ce qui diminue la tension ressentie.

Parallèle avec les troubles humains

Le dysfonctionnement épisodique, aussi appelé trouble explosif intermittent (DSM-IV, Association américaine de psychiatrie, 2000), illustre bien ce comportement.

Caractéristiques principales :

  • Perte de contrôle des impulsions.
  • Réactions intenses et disproportionnées face à des stimuli liés à la colère, la peur ou la rage.
  • États perceptifs altérés durant les épisodes agressifs.

Les similitudes entre la rage défensive animale et certaines formes d’agression humaine, notamment le trouble explosif intermittent, soulignent des mécanismes neurologiques et comportementaux partagés, offrant des pistes importantes pour comprendre et traiter les comportements agressifs humains.

Pouvons-nous contrôler nos tendances à l’agressivité et à la colère ?

La maîtrise de l’agressivité et de la colère repose en grande partie sur l’activité du cortex préfrontal, une région du cerveau impliquée dans le contrôle des impulsions et malléable grâce à l’apprentissage.

Mécanismes de contrôle :

  • Conditionnement et apprentissage : les signaux sensoriels et autonomes (rythme cardiaque, pression artérielle, souvenirs aversifs) atteignent le cortex préfrontal, activant des neurones responsables de la suppression des réponses agressives dans l’hypothalamus.
  • Conscience et avertissement : ces signaux servent de mécanismes d'alerte permettant à l'individu de réguler son comportement agressif avant qu'il ne devienne incontrôlable.

Facteurs limitants :

  • Variabilité génétique : les individus diffèrent dans leur capacité innée à réguler leurs émotions par le cortex préfrontal.
  • Plasticité cérébrale : la capacité d'apprentissage et de régulation diminue avec l’âge, limitant l'efficacité des interventions tardives.

Approches thérapeutiques :

  • La thérapie cognitivo-comportementale (5) a montré une certaine efficacité pour réduire l’agressivité chez les patients motivés.
  • En revanche, la gestion de la colère, souvent administrée de manière informelle par des non-professionnels, manque de preuves solides quant à son efficacité.

Bien que l'apprentissage et la régulation émotionnelle via le cortex préfrontal puissent modérer l’agressivité, cette capacité varie entre les individus et décline avec l’âge, nécessitant des attentes réalistes quant à l’efficacité des interventions thérapeutiques.

Neurobiologie et comportement de l’agression et de la rage

L’objectif de cette recherche était d’analyser les caractéristiques neurobiologiques et comportementales de l’agression et de la rage, en se basant sur une classification binaire entre la rage défensive et l’attaque prédatrice.

 

Cette distinction offre une approche heuristique utile pour comprendre non seulement les aspects comportementaux de l’agression chez les humains et les animaux, mais également les substrats et mécanismes neuronaux sous-jacents.

La rage défensive est déclenchée par un stimulus menaçant, accompagnée d’une activation sympathique (6) marquée.

 

Elle est impulsive, ne nécessite pas l’intervention du cortex cérébral, et la cible de l’agression peut être choisie de manière aléatoire parmi les éléments présents dans le champ visuel.

À l’inverse, l’attaque prédatrice est un comportement généralement planifié, pouvant s’étendre sur des périodes allant de quelques minutes à plusieurs années.

 

Elle est dirigée contre une cible spécifique, montre peu de signes d’activation sympathique, et dépend fortement du cortex cérébral.

Conclusion

La modulation et le contrôle de ces comportements agressifs dépendent largement du cortex préfrontal, une région du cerveau impliquée dans la régulation émotionnelle et le contrôle des impulsions.

 

Le conditionnement et les mécanismes d’apprentissage cortical jouent un rôle clé dans cette modulation, mais leur efficacité dépend de l’âge, de la plasticité cérébrale et des caractéristiques individuelles.

Le principal défi pour l’avenir réside dans une meilleure sensibilisation du grand public, de la justice et des jurys aux principes fondamentaux de la neurologie comportementale.

 

Une compréhension plus fine des mécanismes cérébraux impliqués dans les comportements agressifs permettrait de rendre les jugements plus éclairés et mieux adaptés aux réalités neurobiologiques.

En somme, reconnaître que le comportement humain est façonné par des structures cérébrales matérielles et que des dysfonctionnements peuvent altérer la perception des menaces et le contrôle de soi est essentiel pour une justice plus équitable et informée.


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Sources :

(1) Understanding human aggression: New insights from neuroscience Allan Siegel, Jeff Victoroff
https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0160252709000661?via%3Dihub
(2) https://fr.iliveok.com/health/trouble-de-la-personnalite-organique_108780i15956.html
(3) Moyer, K. E. (1968). Kinds of aggression and their physiological basis. Communications in Behavioral Biology, 2, 65-87.
https://www.semanticscholar.org/paper/Kinds-of-aggression-and-their-physiological-basis-Moyer/f8bae8fbb90f4f40186c30e644ebba182c2f232c
(4) https://fr.wikipedia.org/wiki/Substance_grise_p%C3%A9riaqueducale
(5) https://fr.wikipedia.org/wiki/Th%C3%A9rapie_cognitivo-comportementale

(6) https://fr.wikipedia.org/wiki/Syst%C3%A8me_nerveux_sympathique
- Gedye, A. (1989). Episodic rage and aggression attributed to frontal lobe seizures. Journal of Mental Deficiency Research, 33, 369-379. https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/2795643/
- Kingsbury, S. J., Lambert, M. T., & Hendrickse, W. A. (1997). two-factor model of aggression. Psychiatry, 60, 224-232.
https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/9336854/